L'étiquette en plein air
Publié le 7 août 2024
Par Nathalie Schneider
Même en pleine nature, les règles de bonne conduite s’appliquent pour un partage du territoire agréable et serein. C’est tout l’objet de la nouvelle (et amusante) campagne du Réseau plein air Québec : La nature te juge.
Avril 2024, Cascade Couleuvre, Martinique. Je participe à un voyage de presse avec les représentants de trois autres médias. Nous parvenons dans ce petit paradis au bout d’un sentier en pleine forêt tropicale. L’endroit est magnifique et son côté reclus ajoute à son charme. Après une trempette sous la cascade, nous croquons dans de grosses mangues juteuses que nous avons eu la bonne idée d’apporter avec nous. L’un de mes compagnons se débarrasse des pelures en les jetant un peu plus loin. « C’est biodégradable », dit-il. Argument massue. Sincèrement, je n’en suis pas à ma première expérience du genre. Et, comme d’habitude, je préfère toujours la discussion à la moralisation. J’explique : « Aimerais-tu voir des pelures de fruits en arrivant ici? » Silence. Je récupère les pelures de mes convives et les mets dans mon sac à dos pour les jeter à notre hôtel. Je déteste passer pour une maitresse d’école donneuse de leçon – ce que je ne suis pas. Mais, en ville comme en nature, en Martinique comme au Québec, je suis convaincue que la courtoisie reste encore la meilleure option pour fluidifier les rapports humains.
Sensibiliser les néophytes
La courtoisie en plein air est justement au cœur de la nouvelle campagne du Réseau plein air Québec : « La nature te juge (gentiment bien sûr) ». Menée en collaboration avec des fédérations de plein air et des partenaires comme Aventure Écotourisme Québec, Pourvoiries Québec ou la Société de sauvetage, pour ne citer que ceux-là, cette initiative invite les animaux à se prononcer sur les comportements parfois inappropriés des humains et humaines dans la nature. Même s’ils restent réellement minoritaires, ces comportement déviants s’observent surtout chez une nouvelle clientèle d’adeptes de plein air, née avec la pandémie, peu informée des principes du Sans trace et des enjeux de la cohabitation en nature. On a tous et toutes une histoire d’horreur à raconter à ce propos. « Cette campagne est née à la suite de ce qu’on a observé durant et depuis la pandémie, explique en écho Geneviève Désilets, responsable des communications au Réseau plein air. Beaucoup de néophytes se sont mis au plein air, et c’est tant mieux! On a vu bien plus de gens sur les sentiers, sur les plans d’eau et en montagne, et ceux-ci ne connaissent pas nécessairement les bonnes pratiques, ce qui est normal. Le plein air ne s’apprend pas à l’école. »
Le tribunal des animaux
Si le message de cette campagne porte bien, c’est d’abord parce qu’il est livré en préférant l’humour à l’accusation et à la réprimande. Un cardinal rouge qui interpelle sur des « drifts en quatre roues », une loutre qui n’apprécie pas vraiment entendre « du Céline » sur le lac, un écureuil qui s’insurge quand on fait du hors-sentier : à l’instar des fables de Lafontaine, cet outil de communication induit que la sagesse pourrait bien sortir de la bouche de « nos amies les bêtes ». Si cette initiative porte, c’est aussi parce qu’elle informe autant qu’elle interpelle. La phase estivale de cette campagne comprend un quiz, en ligne dès la première semaine d’août, mené par Réjean le raton laveur, qui invite les personnes participantes à répondre à des questions portant sur plusieurs aspects du plein air; partage de sentier avec les autres adeptes et accès aux terrains privés ou aux aires protégées figurent au rang des thèmes abordés. Une version hivernale du site est également proposée, avec 15 activités à pratiquer sur la neige ou la glace : randonnée en raquette, ski de fond, motoneige, ou encore, escalade de glace.
Cinq façons d’être courtois
Cette campagne de sensibilisation s’articule autour de cinq axes de comportements ainsi formulés : partager, observer, saluer, écouter et ramasser. Le premier axe désigne le partage éclairé du territoire pour parvenir à une cohabitation harmonieuse, notamment entre personnes pratiquant des activités différentes. En effet, des irritants sont parfois observés entre adeptes de randonnée et de vélo, par exemple, sur certains sentiers multidisciplinaires. Ceci implique de connaître les règles d’usage pour que chacun et chacune s’y sente bien. Pour le volet observation, les pratiquantes et pratiquants de plein air sont invités à porter attention à ce qui se passe autour d’eux : autres personnes utilisant le territoire, balisage, panneaux d’interdiction d’accès, etc. Ensuite, saluer ceux et celles qu’on rencontre sur un sentier : ce petit geste permet, bien souvent, de rendre l’expérience plus sympathique pour tout le monde. L’écoute est aussi une façon de prendre compte de son environnement et de faire en sorte d’y atténuer son impact. Enfin, ramasser ses déchets est une autre forme de courtoisie, que ces déchets soient biodégradables ou pas.
Civilité mode d’emploi
La campagne « La nature te juge » propose également un Guide de courtoisie qui examine en détail le code de conduite à privilégier et, ce, pour 32 activités de pleine nature que celles-ci soient ou non motorisées. Tous les conseils spécifiques sont listés, reste que ces règles d’usage tournent toutes autour de plusieurs recommandations quelle que soit l’activité : porter attention à la nature et aux autres, s’informer sur les règlements qui s’appliquent sur le site où on désire pratiquer son activité, minimiser son impact sur le milieu naturel et faire preuve de prudence. « Nous désirons aussi renforcer les bons comportements, dit Geneviève Désilets. Et, ainsi, contribuer à la pérennité des sites de plein air et au plaisir des adeptes. »
Cette campagne est diffusée en ligne via les médias sociaux et sur le site web grand public du Réseau plein air, « On y va ».